La pirogue de la famille TINIRAU
La pirogue de la famille TINIRAU
Taha'a, Iles Sous le Vent, mai 2012
La famille TINIRAU, Maman Nui et la plupart de ses 9 enfants, habite la baie de Apu au sud de l'ile de Taha'a.
L'année dernière ,je leur avais rendu visite lors d'une balade aux Iles Sous Le Vent et ils m'avaient accueilli à bras ouverts
Cette année,après avoir remis SAUDADE à l'eau quelques jours auparavant au CNI (Chantier Naval des Iles) à RAIATEA, après un mois de travaux intenses, je passe de nouveau les voir après avoir débarqué mon vélo chinois, lourd et malcommode, acheté d'occase à RAIATEA.
Les maisons de la famille sont toujours cachées derrière la serre de vanille
La famille est toujours aussi sympathique.
Les petits-enfants ont grandi
Je me balade un peu autour de l'ile en vélo en partant de la baie de Apu pour visiter cette ile que je connais mal et aussi à la recherche de "sujets" d'aquarelles et de dessins.
J'avais remarqué dans ces balades une belle pirogue en contreplaqué et j'en avais fait photos et croquis
Un beau jour Mama Nui m'emmène vers l'auvent qui est derrière sa maison et me montre la pirogue de la famille que j'avais déjà entr’aperçue. Elle est là depuis un an au moins et ne sert plus qu'à remiser divers objets de la maison : outils, cirés, bidons etc.
La pirogue parait en mauvais état : un trou dans la coque et des bordés en contrelaqué plus ou moins attaqués.
Cependant ses formes sont belles avec ses flancs évasés et son étrave incurvée. Comme celle que j'ai vue, c'est une pirogue concue pour naviguer au moteur : les polynesiens ont perdu l'usage de la voile même pour le plaisir ou la régate, remplacée par les compétitions de va'a.
Mais Maman Nui me dit que son père allait à Raiatea distante de quelques miles en pirogue à voile vendre ses légumes au marché de Uturoa.
La pirogue de la famille servait il y a longtemps à emmener les enfants au collège à RAIATEA
Elle a été construite il y a 25 ans par un charpentier de l'île qui est mort depuis et plus personne dans l'île ne sait la réparer.
Vraisemblablement celle que j'ai vue en me baladant est du même constructeur
Maman Nui me demande si je saurai la réparer; je lui répond " Oui je sais faire, pas de problème avec de l'epoxy".
J’examine de plus près l'état de la pirogue. En fait le contreplaqué du bordé parait sain. Le pontage avant est un peu attaqué mais il faut voir cela de plus près après l'avoir vidée.
Donc on décide de s'y mettre avec HITINUI le fils aîné qui a justement 8 jours de vacances
On vide d'abord la pirogue de tout ce qui y a été déposé depuis 1 an.
On va chercher les voisins; puis à une dizaine on la transporte jusqu'à l'auvent de la maison de Hitinui qui fait aussi office de garage.
En fait, elle n'est pas aussi abimée que l'on pouvait le craindre: le bordé enfoncé à quelques endroits, des varangues cassées, un trou dans la coque à l'étrave et, par endroits, la tranche du contreplaqué qui a laissé pénétrer l'eau à coeur.
Il faut d'abord la poncer entièrement; elle a été recouverte d'une peinture avec enduit type bâtiment.
C'est la partie la plus pénible du travail
Le ponçage nous demandera deux ou trois jours avec la poussière à la clef qui rentre partout malgré les précautions de boucher les fenêtres, en fait des louvres surtout destinées à aérer la maison.
Le ponçage rèvele les belles formes de la pirogue et aussi quelque accidents de structure au niveau des varagues.
J'en fais un relevé rapide et des croquis
Elle a une belle forme avec son bordé courbe et évasé.
Ensuite on va à RAIATEA au CNI, le chantier que je viens de quitter, chercher du tissus de verre et de l'epoxy et on commence la réparation : enduit (epoxy cette fois) de la coque, protection de la tranche du contreplaqué par une bande de tissus de verre collée à l'epoxy, réparation des varangues et du pontage avant.
On travaille souvent jusqu'à la nuit et même au dela
Ca avance vite et ça donne soif.
Pendant ce temps les enfants, qui sont en vacances, prennent du bon temps dans le lagon à coté du petit motu qui leur sert de terrain de jeux . Mon annexe (en dur) est de la partie.
On termine en 10 jours le plus gros de travail: les vacances sont terminées.
Je file donc vers Bora-Bora et Maupiti pour trois semaines y faire quelques dessins et aquarelles:
Il ne reste plus qu'à peindre la coque,ce que fera Hitinui,le soir après son travail. Il faut aussi retailler le ama ( le flotteur) ce que fera avec talent Parea l'oncle qui habite à coté, récupérer les "iato" traverses du balancier et réassembler le tout. En fait tout cela demande un gros travail que je ne verrai qu'à mon retour.
Tout le monde m'attend en effet pour remettre la pirogue à l'eau. Posée sur l'herbe à coté de la serre de vanille, elle a vraiment belle allure.
Elle est superbement peinte et assemblée.Encore un fois la famille et les amis sont là pour la mise à l'eau: en cinq minutes elle retrouve son élément.
Tout de suite on va chercher le moteur H.B.et on part vers faire des essais: ils sont concluants:
La pirogue n'a pas fait une goutte d'eau; le ama passe bien dans l'eau
Tout le monde est joyeux : la pirogue a retrouvé son allure d'antan et son usage qui était de transporter toute la famille à travers le lagon.
On file vers Raiatea chercher force bières pour fêter l'évenement et acheter des provisions dont un veau entier pour la fête la mise à l'eau qui aura lieu le lendemain
Ensuite la pirogue de la famille Tinirau retrouvera son portique et sa place devant le motu des enfants.
En attendant de naviguer à nouveau avec la famille à travers le lagon
Pour ma part , je rentre en France pour quelques mois....